La prospérité : des économies durables et inclusives
Pour réaliser le Programme 2030, il faut que l’économie mondiale devienne environnementalement durable et inclusive. L’éducation a un rôle clé à jouer dans cette transformation.
L’éducation et l’apprentissage tout au long de la vie sont nécessaires pour parvenir à une production et une consommation durables, donner les qualifications qui permettront de créer des industries vertes et axer l’enseignement supérieur et la recherche sur l’innovation verte. Mais ils ont aussi un rôle à jouer dans la transformation de certains secteurs économiques clés, comme l’agriculture, dont dépendent les pays et les ménages aussi bien riches que pauvres.
De même que l’économie doit devenir plus durable, elle doit aussi se faire plus inclusive et moins inégalitaire. Une éducation de bonne qualité peut contribuer à la réalisation de ces objectifs. Une main-d’œuvre plus instruite est indispensable à une croissance économique inclusive, axée sur le bien-être de l’humanité. L’éducation réduit la pauvreté en augmentant les chances d’obtenir un emploi décent et des revenus suffisants, et elle aide à combler les écarts de salaires dus au genre, au statut socioéconomique et à d’autres sources de discrimination.
LA DEMANDE DE PERSONNELS QUALIFIÉS AUGMENTERA AVEC LE VERDISSEMENT DE L’ÉCONOMIE
Le développement durable et la croissance verte reposent sur la création d’industries vertes et sur le « verdissement » des industries existantes. Les industries vertes emploient déjà un grand nombre de personnes, et sont promises à une forte croissance dans les pays à faible revenu. Les énergies renouvelables, par exemple, pourraient représenter près de la moitié de l’augmentation totale de la production mondiale d’électricité entre 2015 et 2040, cette croissance intervenant notamment en Afrique, en Amérique latine, en Chine et en Inde.
Les industries vertes ont besoin de travailleurs ayant un haut niveau de qualifications, obtenu dans des filières d’enseignement et de formation supérieures spécifiques ; le verdissement des industries existantes exige de prévoir une formation continue, généralement dispensée sur le lieu de travail, pour les travailleurs peu ou moyennement qualifiés. Responsables politiques et éducateurs sont confrontés à la difficulté de déterminer quelles compétences enseigner, dans des économies en rapide mutation.
Le développement durable et la croissance verte ont besoin d’une augmentation substantielle des investissements en matière de recherche et de développement. Pour permettre aux systèmes d’enseignement supérieur de produire suffisamment de spécialistes dotés des connaissances et compétences voulues dans un large éventail de domaines, des cursus variés et spécifiques sont nécessaires, ainsi que des programmes de coopération transdisciplinaires. L’Agence internationale de l’énergie estime que les gouvernements devront chaque année multiplier par cinq leurs efforts de recherche et de développement dans le domaine de l’énergie pour pouvoir évoluer rapidement vers une faible intensité de carbone.
L’ÉDUCATION PEUT AIDER À TRANSFORMER L’AGRICULTURE
Entre 2015 et 2030, l’agriculture mondiale sera confrontée à un défi sans précédent. C’est l’un des secteurs économiques les plus directement touchés par la dégradation de l’environnement, et il représente le tiers des émissions de gaz à effet de serre. Or, dans le même temps, la croissance démographique exige un accroissement conséquent de la production alimentaire, dans le respect du développement durable, et une répartition plus équitable des approvisionnements en denrées.
L’alphabétisation et les programmes de vulgarisation agricole peuvent aider les agriculteurs à améliorer leur productivité.
L’éducation est cruciale pour une production alimentaire durable. L’éducation primaire et secondaire dote les futurs agriculteurs non seulement des compétences de base indispensables, mais aussi de connaissances cruciales sur les défis de la durabilité agricole. Les politiques en matière de formation et de qualifications professionnelles comblent le fossé entre les agriculteurs et les nouvelles technologies. L’alphabétisation et les programmes de vulgarisation agricole peuvent aider les agriculteurs à améliorer leur productivité. La recherche agricole alliée à l’enseignement tertiaire aide à produire de l’innovation en vue d’améliorer la durabilité. Or, nombreux sont les pays et les donateurs qui ont interrompu ou réduit leurs investissements dans ce type de recherche. La part de l’Afrique subsaharienne dans les dépenses mondiales en matière de recherche agricole publique a notamment baissé, passant de 10 % en 1960 à 6 % en 2009.
L’ÉDUCATION ET L’APPRENTISSAGE TOUT AU LONG DE LA VIE FAVORISENT LA CROISSANCE ÉCONOMIQUE À LONG TERME
Les progrès de l’instruction primaire et secondaire contribuent à la croissance économique à long terme. Le niveau d’instruction initial explique environ la moitié de l’écart de croissance entre l’Asie de l’Est et l’Afrique subsaharienne entre 1965 et 2010. Une éducation de qualité et des travailleurs hautement qualifiés stimulent les gains de productivité et le changement technologique. Les différences de qualité entre systèmes éducatifs expliquent en partie le « miracle » de la croissance économique est-asiatique et les « décennies perdues » de l’Amérique latine. Pour parvenir à la prospérité, les pays doivent impérativement investir dans une éducation secondaire et tertiaire de qualité. Ceci est particulièrement vrai en Afrique subsaharienne, où le taux brut de scolarisation dans l’enseignement supérieur ne dépassait pas 8 % en 2014.
Pour continuer de stimuler la croissance, l’éducation doit rester en phase avec un monde du travail en constante mutation. La technologie n’a pas seulement stimulé la demande de travailleurs hautement qualifiés, elle a aussi diminué la demande de personnels moyennement qualifiés, comme les employés, les vendeurs et les opérateurs sur machine, dont les tâches peuvent être aisément automatisées. Ceci pourrait impacter des millions d’individus à l’avenir : en 2015, un peu moins des deux tiers de la main-d’œuvre totale occupait un emploi de qualification moyenne.
D’ici à 2020, le monde pourrait souffrir d’un déficit de travailleurs ayant une formation tertiaire correspondant à la demande de 40 millions.
Les données suggèrent que, dans leur grande majorité, les systèmes éducatifs ne répondent pas aux besoins du marché. D’ici à 2020, le monde pourrait souffrir d’un déficit de travailleurs ayant une formation tertiaire correspondant à la demande de 40 millions, et d’un excédent de travailleurs de niveau d’études inférieur pouvant atteindre 95 millions. Il est très prévisible que les qualifications et les compétences obtenues dans le cadre d’un enseignement général complet – pensée critique, résolution de problèmes, travail en équipe et au projet, ainsi qu’un solide socle de compétences en alphabétisation, communication et présentation – continueront d’être appréciées sur le marché du travail. L’acquisition d’un éventail de compétences transférables et fondamentales est donc essentielle pour l’emploi futur. La difficulté pour les systèmes éducatifs consiste à trouver les moyens les plus efficaces de les transmettre aux élèves.
L’ÉDUCATION PEUT FAVORISER L’INCLUSION SOCIALE
L’éducation est essentielle pour une croissance économique qui soit durable et ne laisse personne de côté. L’éducation stimule la croissance, améliore les revenus des plus pauvres et, lorsqu’elle est équitablement répartie, réduit les inégalités. Si 10 membres récents de l’Union européenne (UE) atteignaient les cibles de 2020 consistant à réduire les abandons scolaires précoces et à accroître la participation à l’éducation tertiaire, cela pourrait diminuer de 3,7 millions le nombre des personnes guettées par la pauvreté.
Cependant, l’amélioration du niveau de formation et de compétences ne s’est pas toujours et de façon uniforme traduit par une réduction des inégalités sociales. Parallèlement à leurs efforts en faveur d’un élargissement équitable de l’éducation, les gouvernements devraient aussi mettre l’accent sur l’adoption de politiques sociales de redistribution s’ils veulent renverser la tendance à l’aggravation des inégalités de revenus au sein des pays.
L’ÉDUCATION AMÉLIORE LES PERFORMANCES DU MARCHÉ DU TRAVAIL
Les taux de chômage sont plus faibles chez les plus instruits, notamment dans les pays riches. Au sein de l’OCDE, seuls 55 % des adultes âgés de 25 à 64 ans ayant un niveau d’instruction inférieur au second cycle de l’enseignement secondaire avaient un emploi en 2013, contre 73 % de ceux du niveau du second cycle du secondaire ou de l’enseignement non tertiaire et 83 % des diplômés du tertiaire. Dans les pays plus pauvres, la corrélation est souvent moins évidente chez les jeunes, ce qui suggère que la demande de main-d’œuvre qualifiée y est limitée et que les systèmes éducatifs ne dotent pas les élèves des compétences nécessaires.
La réduction des disparités éducatives peut améliorer l’accès des groupes défavorisés à un emploi décent. L’analyse effectuée pour le Rapport GEM 2016 suggère que si les travailleurs de milieux favorisés et moins favorisés avaient le même niveau d’éducation, l’écart en termes de pauvreté laborieuse pourrait baisser de 39 %.
L’éducation est clairement corrélée aux revenus : dans 139 pays, le rendement sur investissement pour chaque année de scolarité supplémentaire atteint 9,7 %. Le rendement est le plus élevé dans les pays plus pauvres qui manquent de travailleurs qualifiés. Néanmoins, pour que les élèves tirent un maximum de bénéfices d’une meilleure réussite scolaire, il faut que les investissements dans l’éducation s’accompagnent de politiques économiques qui stimulent la demande de main-d’œuvre qualifiée.
Si la croissance verte offre de nombreuses possibilités en matière de création d’emplois, les pertes accompagnant la fermeture des industries écologiquement non durables sont inévitables. Les politiques d’apprentissage tout au long de la vie devront donc être développées afin de promouvoir des programmes d’éducation et de formation permettant la réinsertion des travailleurs déplacés.